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Proceedings of the 18
th
International Conference on Soil Mechanics and Geotechnical Engineering, Paris 2013
On présente Figure 5 la courbe contrainte-déformation pour
un autre essai sur Caicos ooids. La variation de volume est
essentiellement et nettement dilatante, après une brève phase de
légère contraction. Les phases de relaxation observables sur la
courbe de contrainte correspondent aux étapes de scan, durant
lesquelles l’écrasement axial est stoppé pendant environ une
heure ; elles sont au nombre de 16. Les incréments analysés ci-
après sont signalés sur la courbe : un incrément en tout début
d’essai, l’incrément juste avant le pic de résistance, et un
incrément en palier, alors que la variation de volume globale a
complètement cessé. En bas de la figure 5, on montre un sous-
volume de grains sélectionnés dans la configuration initiale, et
ce que deviennent ces grains en phase finale.
La Figure 6 (haut et milieu) montre l’évolution du sous-
volume au cours des trois incréments choisis. Un millier de
grains constituent ce volume, dont on représente la position en
début d’incrément avec le déplacement vertical au cours de
l’incrément codé en couleur (ligne du haut), et la rotation de
même (ligne du milieu). Les déplacements sont négatifs parce
que dirigés vers le haut, puisque l’écrasement de l’échantillon
est appliqué par le bas. Un déplacement de 1 pixel vaut 15,6
µm. Dans le premier incrément, les déplacements correspondent
à une déformation diffuse, et les rotations sont insignifiantes et
non organisées spatialement. Dans l’incrément 2, les
déplacements restent diffus mais leur gradient n’est plus
vertical, ce qui indique une rotation globale ; c’est le résultat
d’une bande de cisaillement naissante, régnant sur une large
zone, qu’on observe macroscopiquement. Les rotations
individuelles sont beaucoup plus grandes, mais toujours pas
organisées spatialement. L’incrément 3 montre une bande de
cisaillement complètement développée, nettement plus étroite
que la dimension du sous-volume comme le révèle le gradient
de déplacement très concentré. On observe la coexistence d’une
bande et de blocs quasi rigides au sein du sous-volume), et
confirme la concentration des grandes rotations autour de la
bande, plus fortes en son milieu mais la débordant assez
nettement comme déjà observé plus haut.
La ligne du bas de la Figure 6 montre l’intensité des
rotations dans des coupes verticales de l’échantillon complet,
aux différents incréments. Les incréments 1 et 3 confirment les
observations faites sur les sous-volumes, à savoir absence
d’organisation dans le premier incrément, et forte concentration
dans la bande dans l’incrément final. Cependant l’incrément 2,
situé au pic, montre que les rotations sont organisées à l’échelle
de l’échantillon, dans une bande large d’une quinzaine de
grains, centrée sur ce qui deviendra la bande de cisaillement
développée, nettement plus étroite, dans les incréments suivants.
Il faut noter que l’observation des sous-volumes seulement ne
permet pas de détecter cette phase d’organisation globale
précoce, car elle se déroule à l’échelle de l’échantillon.
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CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
Les développements récents de la micro-tomographie à rayons
X ont rendu possible d’imager en 3D de manière non-
destructive et non-invasive des échantillons de matériaux à des
résolutions qui étaient tout simplement inimaginables voici
vingt ans. Dans le contexte de la mécanique des sols, c’est un
vieux rêve qui est devenu réalité : suivre individuellement
tous
les grains
d’un échantillon en cours de déformation. La
combinaison de cette nouvelle capacité d’imagerie, avec un
savoir-faire expérimental permettant de mener à bien des essais
mécaniques représentatifs sous faisceau RX d’une part, et un
savoir-faire numérique en analyse par corrélation d’image
d’autre part, est extrêmement puissante. Nous sommes capables
aujourd’hui d’extraire du volume énorme de données produites
par ces essais, de nouveaux éléments d’analyse des mécanismes
de déformation à l’œuvre au cœur des échantillons, tout au long
d’un essai. On peut ainsi observer l’évolution de ces
mécanismes aussi bien lors de la phase initiale de montée rapide
de la résistance mobilisée, puis pendant que la déformation
diffuse se développe, puis se localise et conduit finalement à un
plateau caractérisé par une résistance résiduelle dégradée par
rapport à la résistance de pic.
Un projet long terme qui découle naturellement de ces
observations consiste à étudier l’évolution des contacts et leur
rôle dans les mécanismes observés. Des travaux dans cet esprit
ont été effectués en 2D par Calvetti
et al.
(1997) ; le passage au
3D est désormais possible.
D’un point de vue théorique, l’étude des bandes de
cisaillement repose sur une approche de bifurcation, qui fait
jouer à la loi de comportement du matériau un rôle clé dans la
recherche d’une discontinuité spatiale de la vitesse de
déformation. Cependant, c’est seulement avec des approches en
milieux enrichis que la notion d’épaisseur de bande de
cisaillement émerge des équations. Les données expérimentales
produites ici sont pertinentes pour établir de telles approches.
Du point de vue de l’application, les résultats concernant le
développement des bandes de cisaillement en 3D et leurs
caractéristiques, par exemple l’épaisseur reliée à la taille des
grains, sont importants. En effet la localisation de la
déformation affecte souvent les ouvrages géotechniques, tels
qu’excavations et pentes naturelles ou artificielles, digues et
barrages, tunnels et galeries, forages, sites de stockage.
Remarque : une version en couleur de ce texte est disponible :
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REMERCIEMENTS
Ces études ont été rendues possibles par le financement attribué
par l’ANR « blanche » à deux projets successifs, MicroMODEX
(2005-2008) et GeoBridge (2009-2013) qui ont permis de créer
l’installation de tomographie et de rassembler ou développer
autour d’elle les compétences et outils nécessaires.
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REFERENCES
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Calvetti, F., Combe, G., and Lanier, J. (1997) Experimental
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