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Proceedings of the 18
th
International Conference on Soil Mechanics and Geotechnical Engineering, Paris 2013
Proceedings of the 18
th
International Conference on Soil Mechanics and Geotechnical Engineering, Paris 2013
Les histoires de chargements cycliques - calculées ou
mesurées - appliquées aux fondations se composent d’une
succession de charges variables d’amplitude irrégulière et de
distribution relativement aléatoire. Cependant, les essais
cycliques qu’il est possible de réaliser en laboratoire sur des
échantillons de matériaux sont normalement conçus en séries de
cycles d’amplitude régulière et de période constante. Un logiciel
nommé « Cascade » permettant de transformer une série
aléatoire de charges cycliques en une succession de séries
ordonnées d’amplitudes constantes a été développé dans le cadre
du projet. Il est basé sur l’utilisation des méthodes de comptage
de cycles, de type
rainflow
ou “en cascade” (ASTM E 1049-85,
NF A03-406, 1993). Le concept de dommage au sens de Miner
est alors appliqué pour estimer l’endommagement du matériau à
partir de courbes de typ S-N (dites aussi courbes de Wöelher)
obtenues expérimentalement en amenant à la rupture des
échantillons soumis à des séries de cycles d’amplitude de
contrainte constante.
8.2.2.
La base expérimentale du projet SOLCYP
Des essais de pieux ont été conduits sur deux sites
expérimentaux du Nord de la France. Le premier est à
MERVILLE, où l’argile raide très fortement surconsolidée des
Flandres est présente dès 3m de profondeur. Dix pieux d’essai
ont été installés incluant quatre pieux métalliques tubulaires
fermés battus, quatre pieux forés de type CFA, et deux pieux
vissés. Les pieux ont 13m de fiche et des diamètres de 406mm
(pieux battus) ou 420mm (pieux forés). Ils ont été soumis à des
essais de chargement statique conventionnel par paliers, à des
essais de chargement monotone rapide et à des séries d’essais
cycliques incluant des essais à forte amplitude amenés à la
rupture sous un petit nombre de cycles et des essais à faible
amplitude conduits jusqu’à 10 000 cycles. Tous les modes de
chargement ont été appliqués (tension, compression, répétés,
alternés). Les résultats principaux ont été publiés dans Benzaria
et al. 2012 et 2013a.
Le second site est à LOON-PLAGE près de Dunkerque dans
des sables denses. On y a installé deux pieux battus et cinq pieux
forés CFA de mêmes caractéristiques qu’à MERVILLE mais de
fiches différentes (10.5m pour les pieux battus et 8m pour les
pieux forés). Le programme de chargement était similaire
(Benzaria et al. 2013b)
De nombreuses séries d’essais sur pieux modèles
instrumentés ont été réalisées dans du sable de Fontainebleau et
dans de l’argile Speswhite. Ces essais ont été effectués dans la
centrifugeuse de l’IFSTTAR (ex LCPC) à Nantes. L’objectif
poursuivi était d’établir des diagrammes de stabilité cyclique
dans les deux types de sols de référence (sables et argiles) et
pour les deux types de pieux considérés (battus et forés) en
balayant une large gamme de conditions initiales (densité,
consistance, consolidation) et de modes de chargement. Les
premiers résultats ont été publiés (Guefresh et al. 2012 ; Puech et
al. 2013). Ce type d’approche a permis de confirmer la
représentativité des données acquises lors des essais in situ et
d’en étendre la validité.
Une troisième approche expérimentale a consisté à effectuer
des essais sur pieux modèles très fortement instrumentés dans la
grande chambre de calibration du laboratoire 3S-R à Grenoble.
Ces essais en sable de Fontainebleau, conduits en collaboration
avec l’Imperial College de Londres, ont fourni de remarquables
informations sur la mobilisation du frottement à l’interface sol-
pieu et son évolution avec l’intensité et le nombre de cycles (e.g.
Tsuha et al. 2012 ; Silva
et al
., 2013).
8.2.3.
Réponses des pieux aux chargements cycliques
La figure 17 illustre le type de comportement observé sur le site
d’argile surconsolidée de MERVILLE. Elle représente la relation
charge-déplacement de la tête du pieu foré F2 sollicité en
compression. La charge ultime en compression Q
uc
mesurée par
un essai statique conventionnel sur le pieu F1, identique au pieu
F2, est égale à 900kN. Le pieu F2 – qui n’a subi aucune
sollicitation préalable – est d’abord soumis à une série de trois
chargements cycliques de plus de 3000 cycles. Les deux
premières séries (CC1 et CC2) ne provoquent pas de
déplacement permanent significatif du pieu. La troisième série
(CC3) caractérisée par un chargement maximal Q
max
de l’ordre
de 800kN génère des déplacements permanents non négligeables
(près de 20mm). L’essai est arrêté après 3000 cycles et suivi
d’un chargement statique rapide (CR1) qui indique une capacité
post-cyclique de 900kN. Sept séries de cycles sont ensuite
appliquées. Les séries CC4 à CC7 ne provoquent pas de
déplacement permanent de la tête du pieu au bout de 1000 cycles
par série. (On notera que les essais ont été arbitrairement séparés
pour permettre de les visualiser). Les essais CC8 à CC10, qui
atteignent à nouveau un effort maximal de 800kN génèrent des
déplacements permanents qui se cumulent rapidement (chaque
série a moins de 100 cycles). La capacité post cyclique est
toujours de l’ordre de 900kN (essais CR2 à CR4).
0
50
100
150
200
0
100
200
300
400
500
600
700
800
900
1000
D ép lacem en t en tête d u p ieu (m m )
E ffo rt en tête d u p ieu (kN )
C C 1 à 3
C R 1
à C C 1 0
C C 4
C R 2
CR : essais monotones rapides ; CC : essais cycliques répétés
CC1, 2 : N>3000 ; CC3 : N=3000 ; CC4 à 7: N=1000 ; CC8 à 10 :
N<100
Figure 17 : Relations effort-déplacement de la tête lors d’essais répétés
en compression sur le pieu foré F2 de MERVILLE (d’après Benzaria et
al. 2013a).
Ce type de comportement a été retrouvé sur tous les essais
effectués à Merville, quel que soit le type de pieu (foré, vissé,
battu) et le mode chargement (compression pure, tension pure,
alterné). Il peut se résumer ainsi :
- il existe un seuil critique de fonctionnement ;
- pour une charge maximale Q
max
inférieure au seuil, le pieu
est stable (pas de déplacement permanent significatif, raideur
cyclique constante) même pour un nombre élevé de cycles
(N>1000) ;
- dès que ce seuil est atteint, des déplacements permanents
sont générés et la rupture cyclique intervient rapidement,
typiquement en moins de 100 cycles ;
- le seuil est élevé dans le domaine des chargements répétés
(80 à 90% de Q
us
) mais décroit dans le domaine des
chargements alternés (voir figure 3) ;
- la capacité post cyclique n’est pas affectée par les
chargements cycliques préalables.
Le comportement observé sur le site de sable dense de
LOON-PLAGE est très différent. La figure 18 montre la réponse
de deux pieux forés identiques F4 et F5. Le pieu F4 a été soumis
à un essai de chargement statique conventionnel qui indique une
charge ultime de référence Q
uc
= 1100kN. Le pieu F5 a été
soumis à un chargement cyclique caractérisé par une valeur Q
max
~ 0.62 Q
uc
. Le pieu cumule très rapidement des déplacements
permanents (3% de déplacement relatif après seulement 14
cycles). L’essai a été stoppé et l’amplitude cyclique fortement
réduite (Q
max
~ 0.35 Q
uc
). Le pieu a continué à cumuler des
déplacements (14mm en 5000 cycles).
D’une manière générale on a observé que :